Comment un petit ver a aidé à résoudre un grand mystère d’une maladie rare

Brent Derry
Brent Derry
Des chercheurs de SickKids découvrent le rôle important du zinc dans les malformations caverneuses cérébrales.

Les malformations caverneuses cérébrales (Cerebral Cavernous Malformations abbrévié CCM) sont une maladie rare qui provoque des anomalies dans les minuscules capillaires qui transportent le sang dans tout le cerveau. La maladie se manifeste par des irrégularités qui ressemblent à des framboises, le plus souvent dans le cerveau, pouvant entraîner une hémorragie, un accident vasculaire cérébral et des convulsions chez les personnes atteintes. La maladie implique des défauts dans l’un des trois gènes CCM (CCM1, CCM2 ou CCM3) et affecte près d’une personne sur six mille. Il n’existe actuellement aucun traitement approuvé cliniquement pour traiter cette maladie; les patients ont recours à une chirurgie cérébrale invasive, mais certaines formes extrêmes ne peuvent pas être traitées chirurgicalement.

L’un des principaux obstacles à la recherche dans le CCM a été l’identification des voies de signalisation cellulaire pouvant être ciblées pour traiter les patients. Une équipe de l’Hôpital SickKids, dirigée par le Dr Brent Derry, scientifique principal du programme de développement et de biologie des cellules souches de SickKids, s’attaque à ce défi. Cette recherche a été publiée le 17 avril dans Nature Communications.

En examinant chaque gène du génome, l’équipe a identifié un réseau de signalisation cellulaire appelé voie ERK5 qui est suractivé en l’absence de CCM1. Alors que cette découverte avait été faite il y a quelques années sur des modèles de vertébrés tels que le poisson zèbre et la souris, c’était la première fois que la fonction de CCM1 chez C. elegans était conservée. Cette découverte passionnante valide l’utilisation de ce petit ver pour dépister les molécules régulées par la voie ERK5.

Ce petit ver nématode, C. elegans, s’est révélé très utile. Bien que C. elegans ne possède pas de vaisseaux sanguins, ces animaux ressemblent beaucoup aux humains au niveau cellulaire. Les similitudes génétiques entre les vers et les humains signifient que les découvertes faites dans le ver peuvent être applicables aux humains.

Étant donné que cet organisme possède les trois gènes CCM, il est possible d’inhiber systématiquement la fonction de l’un de ces trois gènes et d’utiliser des techniques de criblage puissantes pour ramener les cellules à la normale. C’est précisément l’approche adoptée par l’équipe de recherche.

Pour déterminer dans quelle mesure la suractivation de la voie ERK5 conduit à des défauts cellulaires de type CCM, l’équipe a identifié chaque gène altéré lorsque l’ERK5 est suractivée et a constaté que le transporteur de zinc zipt-2.3 était exprimé à des niveaux beaucoup plus bas. Comme ces transporteurs de zinc sont importants pour stocker correctement le zinc, l’équipe a examiné si la localisation du zinc était perturbée dans les cellules. L’absence de zipt-2.3 a empêché les cellules de garder le zinc sous clé dans les cuves de stockage. Ne pas stocker correctement le zinc dans la cellule entraîne une redistribution dans tout le corps. Ceci, explique Derry, pourrait être la raison pour laquelle des défauts surviennent dans les cellules du système vasculaire des patients atteints de CCM.

«Nous avons utilisé une approche totalement impartiale pour comprendre le fonctionnement du gène CCM1 dans un minuscule ver», explique Derry. « La découverte inattendue selon laquelle il régule le stockage de zinc pour contrôler la survie des cellules ouvre de nouvelles questions passionnantes qui pourraient nous aider à concevoir de nouveaux traitements pour les patients. »

Les recherches effectuées sur les vers ont ensuite été validées chez des poissons zèbres et sur des échantillons de patients CCM avec une équipe internationale de collaborateurs.

Alors que la recherche de traitements pour traiter la maladie CCM reste une préoccupation intense dans la communauté des chercheurs, Derry et son équipe ont prouvé que C. elegans serait un outil essentiel pour l’identification de molécules pouvant permettre au traitement de gérer la progression de cette maladie actuellement incurable. . «Je suis très confiant que nous pouvons apprendre beaucoup de choses sur cette maladie grâce à notre humble ver», déclare Derry.

Cette recherche a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada et la Fondation SickKids. Cette étude montre comment SickKids rend l’Ontario plus sain, plus riche et plus intelligent (www.healthierwealthiersmarter.com).

Source du texte et de l’image: Hôpital SickKids:

https://www.sickkids.ca/AboutSickKids/Newsroom/Past-News/2019/small-worm-unravel-big-mystery.html

Article de recherche original dans Nature Communications:

Chapman EM, Lant B, Ohashi Y, Yu B, Schertzberg M, Go C, Dogra D, Koskimäki J, Girard R, Li Y, Fraser AG, Awad IA, Abdelilah-Seyfried S, Gingras AC, Derry WB. A conserved CCM complex promotes apoptosis non-autonomously by regulating zinc homeostasis. Nat Commun. 2019 Apr 17;10(1):1791. doi: 10.1038/s41467-019-09829-z.