L’Association canadienne des neurosciences reconnaît les investissements clés qui ont été faits pour soutenir des domaines de recherche ciblés dans le budget 2022, mais demande au gouvernement de fournir un soutien plus large à la communauté scientifique canadienne en augmentant le financement de la recherche fondamentale. Nous sommes particulièrement déçus par le manque de soutien accru pour la recherche non ciblée, fondée sur des hypothèses et dirigée par des chercheurs, financée par les trois Conseils subventionnaires fédéraux, les Instituts de recherche en santé du Canada – IRSC, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie – CRSNG, et le Conseil de recherches en sciences humaines – CRSH.
Des investissements clés sont annoncés dans des domaines de recherche ciblés et pour soutenir une communauté de recherche plus diversifiée.
Dans le budget 2022, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, a annoncé des investissements clés pour soutenir la recherche sur la démence (20 millions de dollars sur cinq ans pour des fonds ciblés par l’intermédiaire des IRSC et 30 millions de dollars pour le Centre for Aging and Brain Health Innovation de Baycrest). Le fardeau des troubles neurologiques a considérablement augmenté au cours des 25 dernières années avec le vieillissement de la population et a eu un impact croissant sur les Canadiens et sur l’économie. Nous savons que les troubles neurologiques, comme la maladie d’Alzheimer et la SLA, sont la principale cause d’invalidité et la deuxième cause de décès dans le monde. Ces investissements sont donc bienvenus et opportuns.
L’Association canadienne des neurosciences applaudit de tout cœur le nouveau financement proposé pour soutenir les chercheurs canadiens des communautés noires (40,9 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2022-2023, et 9,7 millions de dollars par la suite, aux conseils subventionnaires fédéraux afin d’appuyer l’octroi de bourses d’études et de perfectionnement ciblées à des chercheurs étudiants des communautés noires prometteurs.). Une main-d’œuvre diversifiée et inclusive mène à une meilleure recherche et à une meilleure science.
De nouveaux fonds ont également été annoncés pour soutenir le Programme des chaires de recherche du Canada (38,3 millions de dollars sur quatre ans, à compter de 2023-24, et 12,7 millions de dollars en continu pour les conseils subventionnaires fédéraux afin d’ajouter de nouvelles chaires d’excellence en recherche du Canada recrutées à l’échelle internationale). Cet investissement aidera le Canada à attirer et à retenir des chercheurs de classe mondiale.
Le besoin d’un soutien plus large pour la communauté de recherche canadienne diversifiée et innovatrice
Bien que nous applaudissions les investissements ciblés annoncés dans le budget 2022, nous devons également exprimer notre déception quant au manque de réinvestissement dans la recherche fondamentale financée par les IRSC, le CRSNG et le CRSH. Ces trois entités constituent le principal mécanisme de financement de la science fondamentale au Canada, et nous sommes très déçus qu’aucun nouveau financement pour la recherche non ciblée soutenue par ces organismes n’ait été annoncé dans le budget 2022. En effet, une fois corrigé de l’inflation, le pouvoir d’achat continue de diminuer et est aggravé par les pressions de la chaîne d’approvisionnement qui ont considérablement augmenté les coûts pendant la pandémie.
Les scientifiques canadiens travaillent pour tous les Canadiens. Leurs découvertes alimentent l’économie de l’innovation, leurs laboratoires forment du personnel hautement qualifié qui contribue à la diversification de la main-d’œuvre canadienne, et leurs découvertes donnent également de l’espoir aux Canadiens qui vivent avec des maladies pour lesquelles il n’existe actuellement aucun remède et peu de traitements. Les neuroscientifiques canadiens s’efforcent de trouver des remèdes et des traitements pour un large éventail de maladies et de troubles du cerveau. La recherche fondamentale visant à comprendre le fonctionnement du cerveau et du système nerveux offre notre meilleure chance de réduire le fardeau des troubles neurologiques et d’améliorer la qualité de vie des Canadiens. La pandémie de COVID-19 nous a montré qu’une crise sanitaire peut avoir de vastes répercussions sur notre santé, notre économie et notre bien-être mental. Investir dans la recherche fondamentale permettra au Canada de relever les défis actuels, mais c’est aussi un investissement dans la préparation scientifique, pour être prêt à affronter le prochain défi de santé.
Si vous demandez à la communauté des chercheurs comment relever les défis de l’avenir, elle vous répondra que la recherche fondamentale est l’élément clé pour développer de nouvelles solutions aux problèmes émergents. Qui aurait pu prédire que la recherche fondamentale sur les nanoparticules lipidiques menée par le professeur Pieter Cullis pendant 40 ans à l’université de la Colombie-Britannique serait un élément clé du développement des vaccins COVID-19 à base d’ARNm ? Pas beaucoup. La semaine dernière, le Dr Cullis a été annoncé comme lauréat du prix Gairdner, souvent précurseur du prix Nobel. Des exemples comme celui-ci montrent pourquoi il est important de soutenir la recherche fondamentale dans tous les domaines et de faire de la recherche motivée par la curiosité et dirigée par des chercheurs une priorité pour le Canada.
C’est maintenant qu’il faut soutenir la recherche fondamentale. Le Canada abrite de nombreux chercheurs novateurs dont les découvertes alimentent l’économie de l’innovation. Nous devons nous efforcer de retenir les talents canadiens en soutenant un écosystème scientifique et de recherche sain. Le niveau de financement des IRSC est resté stagnant alors que les coûts de la recherche augmentent et que le nombre de chercheurs augmente. En même temps, de nombreux pays, dont les États-Unis, réinvestissent massivement dans la science pour stimuler l’économie du savoir.
Un soutien accru est nécessaire pour maintenir notre attractivité pour la prochaine génération de chercheurs. En 2021, les étudiants à la maîtrise et au doctorat bénéficiant d’une bourse d’études supérieures du Canada (BESC) recevront exactement le même montant qu’en 2004, soit 17 500 $ pour un étudiant à la maîtrise et 35 000 $ pour un étudiant au doctorat. Ces bourses n’ont pas suivi l’inflation, et aucun nouvel investissement dans cet important programme n’a été annoncé dans le budget 2022. C’est décourageant pour ces étudiants, qui doivent maintenant faire face à la hausse des coûts de logement et des taux d’inflation, et qui voient leurs superviseurs se battre pour obtenir des fonds de recherche. Le milieu universitaire est donc vu comme un milieu dans lequel il est difficile de percer, sans indication claire que la situation va s’améliorer, et cette perspective décourageante amplifie l’inquiétude quant à la viabilité de la recherche fondamentale, y compris les sciences du cerveau, au Canada.
Nous avons été frappés par cette situation lorsque l’étudiante membre de notre groupe de défense nous a informés qu’elle avait récemment décidé d’abandonner son doctorat pour de nombreuses raisons personnelles et a indiqué que l’une des forces motrices était la difficulté de vivre avec une allocation de 20 000 $ par an à Toronto. Elle est très inquiète pour l’avenir de la science au Canada, car elle voit de nombreux collègues abandonner ou choisir d’autres carrières. Payer les étudiants à un salaire décent est la base de l’équité, de la diversité et de l’inclusion, et est absolument nécessaire si nous voulons attirer les esprits les plus brillants de divers milieux et pas seulement ceux qui sont indépendamment riches.
La présentation du budget 2022 se termine par cette phrase : « Un plan qui investit dans les gens. Et un plan qui aidera à bâtir un Canada où personne ne sera laissé pour compte». Les chercheurs et les étudiants qui dépendent des fonds obtenus par le biais des IRSC, du CRSNG et des SSHR se sentent aujourd’hui un peu laissés pour compte. Nous espérons pouvoir travailler avec le gouvernement pour soutenir la recherche fondamentale à l’avenir.