On sait que les maladies neurodégénératives, comme le parkinson, provoquent la mort graduelle des neurones du cerveau. Mais quels sont au juste les mécanismes qui se dérèglent et les rouages qui s’enrayent pour entraîner la dégénérescence de ces cellules nerveuses ? Une équipe de chercheurs de la Faculté de médecine et de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec a creusé la question et elle démontre, dans un article paru dans le récent numéro des Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), le rôle clé joué par deux protéines régulatrices dans la cascade de réactions conduisant à la mort des neurones dans la maladie de Parkinson.
L’une des principales manifestations du parkinson est la dégénérescence sélective de neurones produisant de la dopamine, un neurotransmetteur qui intervient notamment dans l’initiation et le contrôle des mouvements, rappelle le responsable de l’étude, Martin Lévesque. La spécificité de ces neurones est attribuable à des protéines, appelées facteurs de transcription, qui entraînent l’expression sélective de certains gènes pendant l’embryogenèse. « Certains de ces facteurs de transcription, comme Lmx1a et Lmx1b, continuent d’être exprimés dans le cerveau adulte, presque exclusivement dans les neurones dopaminergiques, mais leurs fonctions étaient encore inconnues. »
Pour jeter un peu de lumière sur la question, les chercheurs ont eu recours à deux approches afin de bloquer l’expression de Lmx1a et Lmx1b dans le cerveau de souris de laboratoire. « Les répercussions de ce blocage s’apparentent beaucoup à ce qui est observé dans le cerveau des personnes atteintes de parkinson », souligne le professeur Lévesque. En effet, les chercheurs ont d’abord noté qu’en absence de ces deux facteurs de transcription, certaines fonctions assurées par les mitochondries cessent de se dérouler normalement. Il y a ensuite formation d’agrégats de protéines, appelés corps de Lewy, puis dégénérescence progressive des neurones dopaminergiques. « Ces manifestations typiques du parkinson sont observées dans la même région du cerveau que chez l’humain », précise le chercheur.
En comparant le profil d’expression des gènes de souris normales et de souris chez lesquelles Lmx1a et Lmx1b avaient été bloqués, les chercheurs ont découvert que les deux facteurs de transcription interviennent dans l’expression d’une protéine appelée NRF1, associée à des gènes mitochondriaux. « Lorsqu’on réintroduit NRF1 à l’aide d’un vecteur viral dans le cerveau de souris sans Lmx1a et Lmx1b, on prévient la dégénérescence de plus de 80 % des neurones dopaminergiques. De plus, les souris ne montrent aucune des manifestations comportementales habituelles du parkinson », rapporte le professeur Lévesque.
Les résultats de cette étude ouvrent des perspectives intéressantes sur plusieurs fronts. D’abord, les chercheurs disposent maintenant d’un nouveau modèle animal qui reproduit bien les principales manifestations du parkinson, ce qui devrait faciliter les recherches dans le domaine. De plus, de nouvelles cibles thérapeutiques contre le parkinson viennent d’apparaître sur l’écran radar. Les travaux actuels de l’équipe du professeur Lévesque visent à approfondir le potentiel de Lmx1a et Lmx1b ainsi que de NRF1 dans le traitement du parkinson.
L’étude publiée dans PNAS est signée par 17 chercheurs, dont Hélène Doucet-Beaupré, Catherine Gilbert, Marcos Schaan Profes, Audrey Chabrat, Véronique Rioux, Julien Charest, Francesca Cicchetti, Martin Parent et Martin Lévesque, de l’Université Laval.
Source du texte: Jean Hamann, Le Fil de l’Université Laval
Article de recherche original:
Doucet-Beaupré H, Gilbert C, Profes MS, Chabrat A, Pacelli C, Giguère N, Rioux V, Charest J, Deng Q, Laguna A, Ericson J, Perlmann T, Ang SL, Cicchetti F, Parent M, Trudeau LE, Lévesque M. Lmx1a and Lmx1b regulate mitochondrial functions and survival of adult midbrain dopaminergic neurons. Proc Natl Acad Sci U S A. 2016 Jul 26;113(30):E4387-96. doi: 10.1073/pnas.1520387113.