Imaginez réparer les moelles épinières et cerveaux blessés. Plusieurs croiront que cet objectif relève de la science-fiction, mais c’est pourtant le but que des chercheurs à travers le monde visent. Ils ont développé et testé des moyens de rebâtir le système nerveux et de restaurer sa fonction. Certains ont même eu du succès dans le laboratoire.
Une de ces méthodes a été publiée plus tôt cette année, http://www.jneurosci.org/content/36/3/979.long par un groupe de scientifiques du Québec qui a trouvé un moyen d’améliorer la réparation des neurones en utilisant une méthode qui pourrait être décrite comme de la microchirurgie. En utilisant une combinaison de micro-outils – en fait, des nano-outils – ces chercheurs ont découvert qu’ils pouvaient contrôler le processus de régénération mécaniquement et ainsi améliorer la probabilité de retrouver une fonction neuronale adéquate après une blessure.
Le processus n’a pas été facile car les chercheurs ont dû utiliser quelques-unes des techniques les plus sophistiquées disponibles, telles que la micromanipulation, la microfabrication, et la microscopie à force atomique, qui permet de visualiser des régions aussi petites que 10 milliardième de mètre http://www.charfac.umn.edu/instruments/afm_introduction.pdf. L’équipe s’est également appuyé sur des recherches qui se sont échelonnées sur presque trente ans pour le faire fonctionner. En tout, le processus représente des décennies d’essais et erreurs pour atteindre ce stade crucial.
La méthode elle-même a été développé en plusieurs étapes. La première étape nécessitait l’utilisation de neurones vivants. Pour y arriver, l’équipe a pris des neurones de l’hippocampe de rats embryonnaires et les ont cultivés en laboratoire. Mais plutôt que d’utiliser des boîtes de pétri habituelles, ces neurones ont été cultivées dans de petits compartiments appelés chambres microfluidiques. Le petit volume de ces chambres permet l’observation de neurones individuels et leur manipulation. Après deux à trois semaines, les neurones étaient prêts pour l’étape suivante.
En utilisant un microscope à force atomique, l’équipe a tenté d’ajouter des billes aux neurones. Ces billes étaient enrobées d’un produit chimique connu sous le nom de poly-D-lysine. L’équipe avait démontré plusieurs années auparavant http://www.jneurosci.org/content/29/40/12449.full que cette molécule pouvait aider les neurones à former des liens entre eux et à développer des synapses. Si l’hypothèse de l’équipe était correcte, l’ajout des billes contribuerait à promouvoir la génération de signaux neuronaux.
Mais les billes ont également servi un autre but. Après la fixation des billes à un certain nombre de neurones, l’équipe pourrait étirer le faisceau. Ceci forcerait les neurones à s’allonger et à former des neurites. Ce fut une étape délicate car trop de pression risquait de nuire aux cellules elles-mêmes. En outre, la résistance à la traction du faisceau de neurones doit être prise en considération pour déterminer la distance de la traction. Pourtant, le groupe a compris la mécanique et a constaté qu’ils pouvaient étirer un neurone jusqu’à presqu’un millimètre de longueur. Bien que ceci puisse sembler assez minime, en termes de réparation du système nerveux, ceci représente une distance significative.
L’étape suivante nécessitait la fusion des deux faisceaux de neurones pour voir si des synapses se formeraient et que des connexions seraient faites. Incroyablement, en seulement 30 minutes, une connexion a été établie montrant qu’ils pouvaient non seulement cultiver des neurones allongés, mais aussi les aider à former des connexions avec un neurone cible. Un examen de la biologie des connexions a montré qu’ils étaient aussi bons que ceux qui sont formés naturellement.
Bien que le processus ait fonctionné, il restait une exigence importante à rencontrer pour les nouvelles liaisons. Elles devaient être en mesure d’envoyer un signal électrochimique. Après tout, sans la capacité de transmettre un signal, la connexion serait inutilisable. Lorsque les tests ont été effectués, les chercheurs ont démontré que les neurites pouvaient envoyer un signal et que ce signal était bel et bien capté et transmis par d’autres neurones. L’effet était presque le même que deux neurones connectés par croissance naturelle.
Les résultats immédiats de l’expérience révèlent que les neurones peuvent être manipuler pour être allongés et pour former des connexions avec d’autres neurones. Cela en soi est un exploit incroyable. Pour la réparation de la moelle épinière et du cerveau, ceci a de plus le potentiel de représenter une nouvelle avenue de thérapie régénérative. Le procédé pourrait être utilisé pour contourner la formation de tissu cicatriciel neural, dont la formation est associée à un blocage de la signalisation appropriée. En outre, la longueur du neurite pourrait permettre de couvrir une plus grande distance, rendant possible des réparations à plus grande échelle. Ces avancées dépendront cependant du développement de nouvelle technologie pour créer des chambres microfluidiques permettant de manipuler des entités biologiques plus grandes.
Une application plus immédiate de cette recherche pourrait se présenter sous forme de réseaux de bio-inorganique. En utilisant cette méthode, une interface cerveau-machine pourrait être développée pour permettre de suivre l’activité des cellules cérébrales. Ceci pourrait fournir plus d’informations sur le fonctionnement du cerveau.
Mais encore plus impressionnant serait la possibilité de réaliser un autre concept lié à la science-fiction, soit la création d’un système nerveux artificiel autonome. Bien que ce système ne pourrait pas atteindre la complexité du système nerveux de l’homme, l’équipe estime qu’il pourrait répliquer le système nerveux d’un organisme modèle simple comme Caenorhabditis elegans, qui a seulement 300 neurones. Si cet objectif était atteint, le développement des réseaux neuronaux synthétiques plus grands pourrait être envisageable.