Une étude ouvre la voie à un nouveau traitement de la douleur chronique

Dr. Jeffrey Mogil

27 mars 2012 – Un gène codant pour un important récepteur de la douleur pourrait permettre d’en personnaliser le traitement

Près d’une personne sur cinq doit composer avec la douleur chronique, un problème de santé insidieux et souvent dévastateur.

Compte tenu des nombreuses percées réalisées depuis vingt ans dans la compréhension des mécanismes biologiques fondamentaux à l’origine de la douleur, il est particulièrement étonnant que ce problème persiste et ne cesse de prendre de l’ampleur. L’un des principaux enjeux que comporte le traitement de la douleur chronique consiste à comprendre pourquoi certaines personnes éprouvent de la douleur alors que d’autres, aux prises avec des troubles ou des lésions similaires, y demeurent insensibles. La mise au point de traitements personnalisés susceptibles de se révéler efficaces chez certaines populations de patients constitue un enjeu tout aussi important.

Une étude publiée en ligne dans Nature Medicine pourrait apporter une solution à ces défis. Une équipe de chercheurs dirigée par les professeurs Jeffrey Mogil, de l’Université McGill, à Montréal, et Michael Salter, de l’Hôpital de Toronto pour enfants (SickKids), affilié à l’Université de Toronto, a identifié un gène important associé à la sensibilité à la douleur chronique. Cette découverte pourrait mener à la mise au point d’une approche personnalisée dans le traitement de la douleur chronique.

Le gène identifié par les chercheurs code pour le récepteur P2X7 de la douleur. Les scientifiques ont notamment constaté qu’une seule altération d’un acide aminé dans le récepteur P2X7 régule la sensibilité aux deux  principales causes de la douleur chronique : l’inflammation et les lésions nerveuses.

L’altération de cet acide aminé ne touche qu’une seule fonction des récepteurs P2X7, soit la formation de pores membranaires qui permet le passage de grosses molécules. L’autre fonction de ces récepteurs, qui consiste à assurer le passage d’ions beaucoup plus petits, demeure intacte. Les chercheurs ont découvert que l’utilisation d’un peptide ciblant exclusivement la formation des pores membranaires se traduisait par une réduction très marquée des comportements associés à la douleur.

Les scientifiques ont ensuite examiné les différences génétiques entre des patients aux prises avec deux types de douleur persistante : la douleur chronique postmastectomie et la douleur associée à l’arthrose. Dans les deux cas, ils ont découvert que la douleur était ressentie moins vivement par les sujets chez qui la formation des pores au niveau des récepteurs P2X7 était limitée en raison de facteurs génétiques.

« Les résultats de notre étude révèlent qu’il pourrait être possible de mettre au point des médicaments susceptibles de bloquer les pores membranaires au niveau de ce récepteur essentiel, tout en préservant son autre fonction. Une telle approche permettrait de soulager la douleur tout en réduisant au minimum le risque d’effets indésirables », affirme le professeur Mogil, titulaire de la Chaire d’études sur la douleur E. P. Taylor du Département de psychologie de l’Université McGill.

Le professeur Salter, titulaire de la Chaire de médecine moléculaire Anne et Max Tanenbaum de l’Hôpital de Toronto pour enfants, précise que ces découvertes « font poindre une nouvelle stratégie axée sur le traitement personnalisé de la douleur chronique ». Des chercheurs des États-Unis et d’Israël ont également participé à cette étude.

L’étude a été financée par la Fondation Krembil, la Fondation Louise et Alan Edwards, les Instituts de santé des États-Unis, les Instituts canadiens de recherche en santé et la Fondation de l’Hôpital de Toronto pour enfants.

 

Source du texte et de l’image : Université McGill, Nouvelles