Dans le but de déterminer le rôle du BDNF chez l’humain, Carl Ernst, Ph.D., du Département de psychiatrie de la Faculté de médecine de l’Université McGill, a soumis à des tests plus de 35 000 personnes adressées à des cliniques de dépistage génétique et plus de 30 000 témoins au Canada, aux États-Unis et en Europe.
Il a observé une délétion du BDNF chez cinq de ces sujets, qui étaient tous obèses, présentaient une déficience intellectuelle légère ou modérée et souffraient de troubles de l’humeur. Parmi les sujets, les enfants présentaient des troubles anxieux, des troubles agressifs ou un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), tandis que les sujets postpubères souffraient d’anxiété et de troubles dépressifs majeurs. Les chercheurs ont observé un gain de poids graduel associé au vieillissement, ce qui permet de croire que l’obésité est un processus survenant à long terme en présence d’une délétion du BDNF.
« Les scientifiques tentaient de trouver une région du génome susceptible d’influer sur la pathopsychologie humaine, et exploraient l’ADN afin de découvrir des indices permettant d’en trouver les causes génétiques, affirme le professeur Ernst, également chercheur à l’Institut universitaire en santé mentale Douglas. Notre étude permet d’établir de façon irréfutable un lien entre une région du génome et la présence de troubles anxieux et de l’humeur. »
Les résultats de cette étude, publiés dans la revue scientifique Archives of General Psychiatry, révèlent pour la première fois l’existence d’un lien entre la délétion du BDNF, la cognition, et le gain pondéral chez l’humain. Si les résultats d’études réalisées chez l’animal avaient déjà permis de déterminer que le BDNF est associé à de nombreuses fonctions cérébrales, aucune étude n’avait encore démontré les effets d’une délétion de ce facteur sur le génome humain. Ces travaux ouvrent la voie à une meilleure compréhension du comportement et de l’humeur chez l’homme en ciblant de façon déterminante les gènes susceptibles de jouer un rôle dans le développement de troubles mentaux.
« L’humeur et l’anxiété sont comparables à un château de cartes. Dans ce cas, les murs du château représentent la multitude d’interactions biologiques qui soutiennent la structure, explique le professeur Ernst. L’étude de ces éléments en mouvement pouvant se révéler complexe, le seul fait d’isoler un événement particulier revêt une grande importance. La découverte d’un lien déterminant entre une délétion du BDNF et l’humeur et l’anxiété signifie qu’il est maintenant possible d’analyser de façon approfondie les voies biologiques intervenant dans la façon dont nous nous sentons et agissons. »
« Nous avons identifié une voie moléculaire qui, nous en sommes persuadés, intervient dans certains troubles psychiatriques, ajoute le professeur Ernst. Puisque l’humeur, l’anxiété et l’obésité mettent en jeu des milliers de gènes, cette découverte nous permet de mieux cibler nos recherches. Tous les participants à notre étude présentaient une déficience intellectuelle légère ou modérée, mais la plupart des gens qui souffrent de tels troubles cognitifs ne souffrent pas de problèmes psychiatriques – comment, dans ce cas, la délétion du BDNF affecte-t-elle l’humeur? J’espère maintenant confirmer l’hypothèse selon laquelle la stimulation de l’expression du BDNF chez les personnes anxieuses ou dépressives peut améliorer la santé du cerveau. »
Source du texte et de l’image: Institut Douglas – Université McGill
Article de recherche original dans: Archives of General Psychiatry