Des scientifiques de SickKids expliquent la résistance à la chimiothérapie et identifient une thérapie possible pour des tumeurs cérébrales chez des bébés

Dr. Michael Taylor

Dr Michael Taylor

Il existe trois outils principaux de lutte contre le cancer du cerveau : la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie. Mais pour les patients atteints d’épendymome, un type de tumeur cérébrale infantile plus fréquent chez les bébés, aucun des médicaments de chimiothérapie standard n’a démontré une efficacité, malgré de nombreux essais cliniques.. Alors que les traitements pour de nombreux autres cancers infantiles ont changés et se sont améliorés au cours des deux dernières décennies, la chimiothérapie pour épendymome a stagné. La cause sous-jacente de cette chimio-résistance a dérouté les médecins jusqu’à maintenant.

De nouvelles recherches effectuées au Hospital for Sick Children ( SickKids ) expliquent pour la première fois pourquoi les chimiothérapies standard ne fonctionnent pas sur les épendymomes, et ont également permis d’identifier un médicament déjà approuvé par la FDA qui pourrait aider ces jeunes patients. L’étude est publiée dans l’édition en ligne du 19 février de la revue Nature.

À ce jour, tous les cancers humains qui ont été étudiés présentaient des mutations ou des erreurs dans l’ADN : parfois il manque un bout d’ADN, parfois un bout est dupliqué, ou alors il n’est pas au bon endroit. Afin de trouver la cause génétique sous-jacente de cette résistance à la chimio, l’équipe de recherche a séquencé le génome et l’exome de 47 échantillons d’épendymome, et ce qu’ils ont trouvé était surprenant. «Il y avait zéro mutation importante. Nos résultats indiquent que l’épendymome est le premier cancer pour lesquels le séquençage du génome a échoué à identifier des gènes mutés importants ou récurrents « , explique le Dr Michael Taylor, chercheur principal de l’étude et neurochirurgien et scientifique senior au Hospital for Sick Children.

Les chercheurs ont constaté que le problème n’était pas qu’il y avait des erreurs dans le code de l’ADN de la tumeur, mais que l’ADN avait été mal emballé, et que les cellules cancéreuses se comportaient comme des cellules souches ayant la capacité continue de se diviser. « On pourrait comparer l’ADN à un livre, la plupart des cancers étant causés par des fautes d’orthographe, des pages manquantes ou des chapitres dans le mauvais ordre. Dans l’épendymome, on ne trouve pas ces erreurs, mais le livre est écrit dans la mauvaise police », explique Taylor. «La plupart des chimiothérapies fonctionnent en favorisant les dommages à l’ADN, ce qui entraîne les cellules cancéreuses, qui ont des génomes mutés, à l’auto -destruction. Puisque les épendymomes n’ont pas des mutations importantes, ceci explique pourquoi la chimiothérapie ne fonctionne pas».

Une fois que l’équipe de recherche a su quel était le problème, ils ont pu commencer à chercher des solutions. Il existe déjà des médicaments qui peuvent modifier la façon dont l’ADN est emballé, mais l’équipe devaient d’abord réussir à cultiver des lignées de cellules d’épendymome pour tester les médicaments, une chose qui n’avait pas été faite avant. À partir de morceaux de tumeurs prélevés de patients, le laboratoire du Dr Peter Dirks a réussi à faire pousser des lignées de cellules d’épendymome afin que l’équipe puisse tester si les médicaments avaient un effet sur ces cellules in vitro. Et ils ont démontré leur efficacité. Dirks est neurochirurgien et scientifique principal au Hospital for Sick Children.

«Ce fut l’étape fondamentale pour donner une réalité à cette recherche et la rendre potentiellement significative pour nos patients », a déclaré Taylor, qui est également professeur aux départements de chirurgie et de médecine de laboratoire et de pathologie à l’Université de Toronto, et «Garron Family Chair in Childhood Cancer Research» à SickKids. L’équipe ne s’est pas arrêtee là : une fois qu’ils ont démontré l’efficacité des médicaments sur des lignées cellulaires cultivées in vitro, ils sont allés plus loin et ont testé les médicaments sur une tumeur épendymome prélevée chez un de leurs patients.

«Nous avons réussi à passer de la table d’opération au laboratoire pour tester ce médicament sur la tumeur d’un patient donné », dit Taylor. Tout comme dans les lignées cellulaires, le médicament a été efficace sur la tumeur et est actuellement utilisé pour traiter cet enfant. « Cette nouvelle étape vers des soins individualisés du cancer est très excitant, et nous espérons que ceci pourra être adapté à d’autres tumeurs cérébrales aussi. « 

Les chercheurs expliquent que ces médicaments qui ciblent l’ADN mal emballés représentent la première stratégie pour le traitement de cette maladie incurable, et qu’ils doivent être considérés pour des essais cliniques pour les enfants avec épendymome.

Source du texte: Hospital for Sick Children

Traduction: CAN-CAN

Article de recherche original:
Mack SC, Witt H, Piro RM, Gu L, Zuyderduyn S, Stütz AM, Wang X, Gallo M,Garzia L, Zayne K, Zhang X, Ramaswamy V, Jäger N, Jones DT, Sill M, Pugh TJ,Ryzhova M, Wani KM, Shih DJ, Head R, Remke M, Bailey SD, Zichner T, Faria CC,Barszczyk M, Stark S, Seker-Cin H, Hutter S, Johann P, Bender S, Hovestadt V,Tzaridis T, Dubuc AM, Northcott PA, Peacock J, Bertrand KC, Agnihotri S, Cavalli FM, Clarke I, Nethery-Brokx K, Creasy CL, Verma SK, Koster J, Wu X, Yao Y, Milde T, Sin-Chan P, Zuccaro J, Lau L, Pereira S, Castelo-Branco P, Hirst M, Marra MA, Roberts SS, Fults D, Massimi L, Cho YJ, Van Meter T, Grajkowska W, Lach B,Kulozik AE, von Deimling A, Witt O, Scherer SW, Fan X, Muraszko KM, Kool M,Pomeroy SL, Gupta N, Phillips J, Huang A, Tabori U, Hawkins C, Malkin D, Kongkham PN, Weiss WA, Jabado N, Rutka JT, Bouffet E, Korbel JO, Lupien M, Aldape KD,Bader GD, Eils R, Lichter P, Dirks PB, Pfister SM, Korshunov A, Taylor MD.Epigenomic alterations define lethal CIMP-positive ependymomas of infancy.Nature. 2014 Feb 19. doi: 10.1038/nature13108. [Epub ahead of print]

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