Tumeur au cerveau fatale chez l’enfant: un pas vers un traitement personnalisé

Dr. Cynthia Hawkins
Cynthia Hawkins

Imaginez, comme parent, qu’on vous annonce que votre enfant de six ans a une tumeur au cerveau pour laquelle il n’existe pas de traitement efficace, et qui est presque toujours fatale. C’est la dure réalité pour les 30 enfants au Canada qui sont diagnostiqués chaque année avec un cancer pédiatrique rare appelé gliome diffus pontique intrinsèque (diffuse intrinsic pontine glioma – DIPG ). L’inefficacité de la plupart des thérapies pour ce cancer peut être attribuée à l’emplacement sensible de la tumeur et à la supposition que les DIPGs sont similaires à un type de cancer du cerveau adulte, les glioblastomes.

Dans une nouvelle étude menée à The Hospital for Sick Children ( SickKids ), des chercheurs ont découvert les facteurs génétiques produisant le DIPG et identifié trois sous-groupes distincts de la maladie. L’étude démontre que cette tumeur est non seulement différente du cancer du cerveau adulte, mais les gènes trouvés n’ont jamais été impliqués dans d’autres cancers, y compris un nouveau gène du cancer nommé ACVR1. L’étude est publiée dans l’édition en ligne du 6 avril de Nature Genetics.

Contrairement à d’autres tumeurs au cerveau, le DIPG ne peut pas être enlevé chirurgicalement car il s’infiltre dans le câblage du tronc cérébral qui contrôle les fonctions vitales comme la respiration, et la régulation et le mouvement du coeur. Par conséquent, des biopsies ne sont que rarement effectuées, et en absence de tissus, le fondement génétique du DIPG n’a pas été exploré jusqu’à présent.

«Ce travail nous donne l’occasion de faire de réels progrès pour ces patients et leur famille. Nous avons constaté qu’il y a différentes voies génétiques qui contrôlent le comportement de chaque sous-groupe de DIPG, ce qui a des conséquences importantes essentielles pour la conception d’un traitement approprié et mieux ciblé de ces tumeurs. En d’autres termes, cela signifie que pour chaque sous-groupe il faudra un traitement différent », explique le Dr Cynthia Hawkins, chercheure principale de l’étude, neuropathologiste et scientifique en biologie cellulaire à l’ Hospital for Sick Children.

L’équipe de recherche a effectué une caractérisation génétique détaillée de plus de 60 échantillons de DIPG, incluant un séquençage en profondeur sur 36 DIPGs, provenant de partout au Canada, des États-Unis, de l’Australie et du Royaume-Uni, afin de découvrir le fondement génétique de ces tumeurs. » Nous avons été surpris de constater combien les mutations étaient fréquentes dans ce type de cancer. La plupart du temps quand on fait des études génétiques, on trouve des mutations dans 5 pour cent des cas. Ici, nous avons trouvé différents gènes que nous pouvons cibler dans 20 à 80 pour cent des cas. Ceci était inattendu et très encourageant, car du point de vue d’essais cliniques, cela pourrait signifier que nous avons la possibilité d’avoir un plus grand impact sur plus de patients «.

Les enfants atteints de DIPG présentent généralement vers l’âge de six ou sept ans des symptômes neurologiques bénins comme la faiblesse, un boitement ou des problèmes de vision. Puisque la chirurgie n’est pas une option et que la chimiothérapie n’a montré aucun avantage, le traitement par radiothérapie a été la principale thérapie offerte pour le contrôle des symptômes, pour une courte durée. Malheureusement, tous les enfants meurent dans les deux ans qui suivent le diagnostic.

Pour les patients avec une tumeur inopérable, les thérapies ciblées sont particulièrement importantes. «Avec d’autres cancers, les chirurgiens visent à éliminer la majorité de la tumeur et font un suivi avec la radiothérapie et / ou la chimiothérapie pour attaquer le cancer qui reste. Pour le DIPG, il serait nécessaire de traiter la totalité de la tumeur pour avoir un impact».

L’équipe explique que ce n’est encore que le début, mais que les prochaines étapes sont déjà en cours; les chercheurs étudient présentement les mutations génétiques spécifiques à chaque sous-groupe, et explorent les cibles thérapeutiques qui pourraient fonctionner.

Cette recherche n’aurait pas été possible sans les patients et leurs familles qui ont fait des dons de tissu pour cette recherche et le soutien des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), de Génome Canada et de la Fondation SickKids.

Source du texte: Hospital for Sick Children

Article de recherche original: Buczkowicz P, Hoeman C, Rakopoulos P, Pajovic S, Letourneau L, Dzamba M, Morrison A, Lewis P, Bouffet E, Bartels U, Zuccaro J, Agnihotri S, Ryall S, Barszczyk M, Chornenkyy Y, Bourgey M, Bourque G, Montpetit A, Cordero F, Castelo-Branco P, Mangerel J, Tabori U, Ho KC, Huang A, Taylor KR, Mackay A, Bendel AE, Nazarian J, Fangusaro JR, Karajannis MA, Zagzag D, Foreman NK, Donson A, Hegert JV, Smith A, Chan J, Lafay-Cousin L, Dunn S, Hukin J, Dunham C, Scheinemann K, Michaud J, Zelcer S, Ramsay D, Cain J, Brennan C, Souweidane MM, Jones C, Allis CD, Brudno M, Becher O, Hawkins C. Genomic analysis of diffuse intrinsic pontine gliomas identifies three molecular subgroups and recurrent activating ACVR1 mutations. Nat Genet. 2014 Apr 6. doi: 10.1038/ng.2936. [Epub ahead of print]