Une équipe internationale jette un nouvel éclairage sur la schizophrénie

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Les gènes et voies métaboliques identifiées pourraient mener à de nouvelles approches de traitement

Dans le cadre d’un effort de collaboration multinationale, les chercheurs du Centre for Addiction and Mental Health (CAMH) ont permis d’identifier plus de 100 régions du génome humain associés au risque de développer la schizophrénie, ce qui en fait la plus grande étude génomique publié sur un trouble psychiatrique à ce jour. Les résultats, publiés en ligne dans la revue Nature, éclaire les mécanismes et voies qui sous-tendent la biologie de la schizophrénie, et pourrait conduire à de nouvelles approches de traitement de la maladie, pour laquelle peu d’innovation dans le développement de médicaments a été fait en près de 60 ans.

La schizophrénie est une maladie mentale débilitante qui touche environ une personne sur 100 dans le monde. Elle se caractérise par des hallucinations, des délires, et troubles de la pensée, et se manifeste souvent durant l’adolescence ou au début de la vingtaine. Son impact sur les individus et la société est élevé, tant en termes de soins de santé directs que d’autres coûts, et en perte de productivité et en chômage, avec un coût estimé à 6,85 milliards de dollars par année au Canada.

Les médicaments actuellement sur le marché ne traitent que l’un des symptômes de la maladie (la psychose), et il n’existe aucun traitement efficace pour les symptômes cognitifs débilitants de la schizophrénie. Les options de traitement sont limitées en partie parce que les mécanismes biologiques sous-jacents la schizophrénie n’étaient pas compris.

Des recherches récentes portant sur les fondements génétiques de la schizophrénie ont révélé la complexité de la maladie. Les résultats suggèrent que la maladie est causée par les effets combinés de plusieurs gènes, et à peu près deux douzaines de régions génomiques ont été associées à la schizophrénie. Cette nouvelle étude confirme les conclusions antérieures, et élargit notre compréhension des bases génétiques de la schizophrénie et de la biologie sous-jacente. Dans l’étude d’association pangénomique (GWAS) publiée dans Nature, les auteurs ont examiné 36 989 échantillons génétiques provenant de patients atteints de schizophrénie et 113 075 provenant de volontaires sains et ont trouvé 108 emplacements spécifiques associés au risque de schizophrénie dans le génome humain. Quatre-vingt-trois de ces locis n’avait pas été liées à la maladie précedemment.

«De grands efforts de collaboration comme celui-ci sont nécessaires pour identifier les gènes qui influencent les troubles complexes,» a déclaré le Dr Jo Knight, scientifique senior et professeur en sciences du comportement Joanne Murphy , qui a dirigé la participation de CAMH dans ce projet. «Le résultat est une avancée majeure dans la compréhension des bases génétiques du fonctionnement du cerveau dans la schizophrénie», a déclaré Dr Knight, qui est également professeure agrégée de psychiatrie à l’Université de Toronto.

La contribution canadienne a été menée au Campbell Family Mental Health Research Institute de CAMH, et les Drs James Kennedy et Clement Zai , également à CAMH, ont également participé à l’étude.

L’étude a révélé l’implication de gènes exprimés dans le cerveau, en particulier ceux liés au fonctionnement de cellules du cerveau (neurones) et des canaux permettant des échanges de signaux chimiques et électriques entre les neurones (dans les synapses). Ceux-ci incluent des gènes actifs dans les voies de contrôle de la plasticité synaptique – une fonction essentielle à l’apprentissage et à la mémoire – et des voies qui régissent l’activité dans les cellules-cibles qui reçoivent les signaux.

De plus, les chercheurs ont trouvé un petit nombre de gènes associés à la schizophrénie qui sont actifs dans le système immunitaire. Cette découverte offre un soutien à l’hypothèse selon laquelle il y aurait un lien entre la schizophrénie et les processus immunologiques. L’étude a également montré une association entre la maladie et la région du génome qui inclut DRD2 – le gène qui produit le récepteur de la dopamine ciblé par tous les médicaments approuvés pour la schizophrénie – ce qui suggère que d’autres locis découverts dans l’étude pourraient devenir des cibles thérapeutiques supplémentaires.

«Le fait que nous ayons été en mesure de détecter les facteurs de risque génétiques sur cette grande échelle montre que la schizophrénie peut être traitée par les mêmes approches qui ont déjà transformé notre compréhension d’autres maladies», a déclaré l’auteur principal, le Dr Michael O’Donovan, directeur adjoint du MRC Centre for Neuropsychiatric Genetics and Genomics à l’École de médecine de l’Université de Cardiff. «La richesse des nouvelles découvertes a le potentiel de lancer le développement de nouveaux traitements pour la schizophrénie, un processus qui a stagné pendant les 60 dernières années.»

L’étude est le résultat de plusieurs années de travail du Schizophrenia Working Group du Psychiatric Genomics Consortium (PGC), une collaboration internationale, multi-institutionnelle fondée en 2007 pour mener l’analyse à grande échelle des données génétiques pour les maladies psychiatriques. Un total de 55 ensembles de données de plus de 40 contributeurs différents, y compris CAMH, ont été nécessaires pour procéder à l’analyse.

Les échantillons utilisés dans cette étude représentent tous les ensembles de données génotypées pour la schizophrénie que le consortium a amassés à ce jour. Le PGC procède actuellement au génotypage de nouveaux échantillons à étudier pour la schizophrénie et des maladies psychiatriques supplémentaires, y compris l’autisme et le trouble bipolaire.

Le financement de base du Psychiatric Genomics Consortium (PGC)vient du National Institute of Mental Health (NIMH) américain, ainsi que de nombreuses subventions d’organisations gouvernementales et caritatives, et de dons philanthropiques. La contribution canadienne a été financée en partie par la subvention de recherche MOP-115097 des Instituts de recherche en santé du Canada .

Source du texte: Centre for Addiction and Mental Health – CAMH

Traduction: CAN-ACN

Article de recherche original:
Schizophrenia Working Group of the Psychiatric Genomics Consortium. Biological
insights from 108 schizophrenia-associated genetic loci. Nature. 2014 Jul
24;511(7510):421-7. doi: 10.1038/nature13595. Epub 2014 Jul 22
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