29 février 2012 – Activer le cortex visuel améliore notre odorat. Pour la première fois, une étude révèle que l’activation du cortex visuel du cerveau par la stimulation électrique améliore bel et bien notre odorat. Les résultats publiés dans le Journal of Neuroscience par des chercheurs de l’Institut et hôpital neurologiques de Montréal, le Neuro de l’Université McGill, et le Monell Chemical Senses Center, Philadelphia, remet en question notre compréhension de la biologie complexe des sens dans le cerveau.
« Nous savons qu’il existe des aires spécialisées distinctes dans le cerveau pour les différents sens comme la vue, l’odorat, le toucher, etc., mais pour connaître le monde autour de nous, nous nous fondons sur une image cohérente obtenue d’informations provenant de tous les sens. Nous voulions découvrir les rouages de tout cela dans le cerveau », dit le professeur Christopher Pack, chercheur principal au Neuro. « Nous voulions notamment tester l’idée selon laquelle l’activation de régions du cerveau consacrées surtout à un sens pourrait influer sur le traitement fait par d’autres sens. Nous avons découvert que la stimulation électrique du cortex visuel améliore la performance de participants qui doivent identifier l’odeur différente parmi trois odeurs. » Ce résultat est intéressant en ce qu’il montre, pour la première fois, que les structures du cerveau intervenant dans différents sens sont fondamentalement assez liées chez chacun – davantage qu’on le pensait avant.
« Cette “interconnexion” des sens a été décrite chez des personnes atteintes de synesthésie, un trouble dans lequel la stimulation d’un sens mène à des expériences automatiques et involontaires dans un deuxième sens; ainsi, les gens peuvent voir la couleur des nombres, ou sentir des mots, ou entendre des odeurs », souligne le professeur Johan Lundstrom du Monell Chemical Senses Center. « Cette étude montre maintenant que l’interconnexion des sens existe chez tout le monde, ce qui jusqu’à un certain degré fait de nous tous des personnes atteintes de synesthésie. »
Pour examiner la possibilité que l’activation du cortex visuel influe sur l’odorat, on a testé des sujets avant et après l’application de stimulation magnétique transcrânienne (SMT), une méthode non effractive de stimuler des zones précises du cerveau. La SMT a été dirigée vers le cortex visuel au moyen d’un protocole qui améliore la perception visuelle, comme l’avaient établi auparavant des chercheurs du Neuro. La SMT est déjà utilisée couramment pour traiter certains symptômes, et comme elle modifie l’activité du cerveau dans une zone précise, elle vérifie de façon convaincante l’hypothèse selon laquelle l’activation du cortex visuel change la perception olfactive.
Les résultats montrent que l’activité du cortex visuel est associée au traitement des odeurs, prouvant pour la première fois une interconnexion des systèmes visuel et olfactif dans le cerveau. Il est intéressant de noter que l’équipe n’a pas pu attester une interconnexion similaire entre les systèmes olfactif et auditif. Cela semble indiquer que la vision pourrait jouer un rôle spécial en reliant l’information des différents sens, une possibilité que les chercheurs explorent présentement. Outre les professeurs Pack et Lundstrom, la recherche a été menée par Jahan Jadauji, étudiant à la maîtrise, et Jelena Djordjevic, neuropsychologue clinique et neuroscientifique, tous deux au Neuro. Cette collaboration entre chercheurs et cliniciens a pu être réalisée grâce à l’institut de recherche et à l’hôpital intégré du Neuro.
L’étude a été financée par le Centre d’excellence en commercialisation et en recherche, la Fondation Alfred P. Sloan, le Conseil suédois de la recherche et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, ainsi que madame Anna Engel.
L’Institut et hôpital neurologiques de Montréal
L’Institut et hôpital neurologiques de Montréal, le Neuro, est un centre médical universitaire spécialisé en neurosciences. Fondé en 1934 par l’éminent Dr Wilder Penfield, le Neuro a acquis une renommée internationale pour son intégration de la recherche, de ses soins exceptionnels aux patients et de sa formation spécialisée, essentiels à l’avancement de la science et de la médecine. À la fois institut de recherche et d’enseignement de l’Université McGill, le Neuro constitue l’assise de la mission en neurosciences du Centre universitaire de santé McGill. Les chercheurs du Neuro sont reconnus mondialement pour leur expertise en neurosciences cellulaire et moléculaire, en imagerie cérébrale, en neurosciences cognitives, ainsi que dans l’étude et le traitement de l’épilepsie, de la sclérose en plaques et de troubles neuromusculaires. L’Institut neurologique de Montréal a été désigné un des sept Centres d’excellence dans le budget 2007 du gouvernement canadien, ce qui donnait à l’INM un financement de 15 millions de dollars pour soutenir ses activités de recherche et de commercialisation se rapportant à la maladie neurologique et aux neurosciences.
Source du texte et de l’image: Université McGill
Article original dans le Journal of Neuroscience (abonnement requis)