Jade Degrandmaison – Université de Sherbrooke
Publication scientifique
Jade Degrandmaison, Khaled Abdallah, Véronique Blais, Samuel Génier, Marie-Pier Lalumière, Francis Bergeron, Catherine M. Cahill, Jim Boulter, Christine L. Lavoie, Jean-Luc Parent, and Louis Gendron. In vivo mapping of a GPCR interactome using knockin mice. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, 117(23):13105-13116, 2020
Une étude de l’interactome du récepteur delta-opioïde dans le cerveau permet de mieux comprendre ses fonctions dans les voies liées à la douleur
Compte tenu de ses propriétés analgésiques et des effets indésirables plus légers qui y sont associés, le récepteur delta-opioïde (DOPr) représente une cible thérapeutique prometteuse pour le traitement de la douleur chronique. Le DOPr est un membre d’une grande famille de plus de 800 récepteurs couplés aux protéines G (RCPG), qui sont impliqués dans la régulation précise de pratiquement tous les systèmes physiologiques. Malgré leur importance pharmacologique inestimable (environ 34 % de tous les médicaments actuels ciblent les RCPG), ces récepteurs se sont avérés difficiles à étudier, en raison de leurs propriétés structurelles, de leur faible abondance et du manque d’anticorps spécifiques. En utilisant des modèles de souris transgéniques nouvellement générés et des analyses protéomiques, Jade Degrandmaison et ses collègues ont développé une nouvelle approche pour surmonter ces défis. Dans cette publication, ils révèlent le premier interactome in vivo d’un RCPG, à savoir le récepteur delta-opioïde (DOPr), à partir de tissus cérébraux.
Le DOPr induit des effets analgésiques et atténue les hypersensibilités à la douleur dans plusieurs modèles de douleur chronique, notamment la douleur neuropathique, inflammatoire, diabétique et cancéreuse, tout en produisant beaucoup moins d’effets indésirables que la plupart des thérapeutiques opioïdes cliniques. L’activation de la DOPr a également été associée à des effets anxiolytiques, antidépresseurs, cardioprotecteurs et neuroprotecteurs, ce qui en fait une cible thérapeutique attrayante pour le traitement de la douleur chronique. Bien qu’elle soit considérée comme une cible thérapeutique très prometteuse pour le traitement de la douleur chronique, les mécanismes moléculaires et cellulaires qui sous-tendent la régulation du trafic et de la signalisation de la DOPr restent mal caractérisés.
Cette étude, qui a conduit à l’identification de protéines modulant potentiellement sa structure, sa localisation et ses fonctions, représente donc une étape cruciale vers notre compréhension des processus cellulaires impliqués dans les voies liées à la douleur, ainsi que dans notre tentative ultime de développer des analgésiques puissants et mieux tolérés en cette période de crise des opioïdes.
De plus, les lignées de souris générées et décrites dans cet article représentent de nouveaux outils importants pour déchiffrer les fonctions de la DOPr dans des populations de neurones et des circuits spécifiques. Puisque cette nouvelle approche peut être transposée à n’importe quel autre récepteur, ce travail peut également être la base pour l’étude d’autres RCPG dans leur environnement physiologique natif, offrant ainsi de nouvelles perspectives et applications pour l’étude de plusieurs autres conditions pathologiques, notamment les maladies cardiovasculaires, le diabète et le cancer.
Jade Degrandmaison
Jade Degrandmaison a utilisé deux nouvelles lignées de souris, caractérisées au laboratoire Gendron par le post-doctorant Khaled Abdallah, pour révéler l’interactome endogène du récepteur delta-opioïde (DOPr), une approche inédite pour un RCPG. En utilisant les tissus cérébraux de ces souris transgéniques uniques, elle a développé et validé une approche permettant l’identification de plusieurs protéines interagissant avec le DOPr in vivo, fournissant ainsi une liste de régulateurs potentiels de ses fonctions physiologiques, y compris ses rôles dans les voies liées à la douleur.
Jade Degrandmaison a contribué de manière significative à la conceptualisation et au design expérimental de l’étude, à la méthodologie et aux expérimentations, ainsi qu’à l’analyse des données. Elle a supervisé et formé les autres étudiants diplômés qui ont travaillé sur ce projet. Elle a rédigé le manuscrit et participé à la réponse à la révision éditoriale et a conçu et réalisé la plupart des expériences demandées par les évaluateurs au cours du processus d’examen par les pairs.
Ces travaux ont été présentés dans plusieurs conférences internationales influentes, notamment l’International Narcotics Research Conference (INRC) à New York (USA), la conférence Molecular Pharmacology Gordon Research en Californie (USA) et la Great Lake GPCR retreat à Bromont (CAN).
Jade Degrandmaison a reçu une bourse de doctorat du Fonds de Recherche Québec-Santé pour réaliser ce travail. Elle est actuellement doctorante dans les laboratoires de Jean-Luc Parent et Louis Gendron à l’Institut de Pharmacologie de Sherbrooke, affilié à l’Université de Sherbrooke.
Elle a reçu le prix « Relève étoile Jacques-Genest » du Fonds de Recherche Québec-Santé, reconnaissant une contribution exceptionnelle à la recherche pour cette publication.
Jade Degrandmaison souligne que cette étude de recherche est le résultat d’un travail d’équipe considérable de tous les auteurs et n’aurait pas été possible sans les conseils, l’expertise et le soutien exceptionnels de ses deux superviseurs.
Sources de financement :
Ce travail a été soutenu par le Réseau québécois de recherche sur la douleur et les Instituts de recherche en santé du Canada. Les collaborateurs ont reçu le soutien du Fonds de la recherche du Québec-Santé, de l’Université de Sherbrooke et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Les recherches ont été effectuées en collaboration avec l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA).