
Diego B. Piza, Western University
Article scientifique primé:
Piza, D.B., Corrigan, B.W., Gulli, R.A., Do Carmo, S., Cuello, A.C., Muller, L., Martinez-Trujillo, J. Primacy of vision shapes behavioral strategies and neural substrates of spatial navigation in marmoset hippocampus. Nat Commun 15, 4053 (2024). https://doi.org/10.1038/s41467-024-48374-2
Mieux comprendre le rôle de la vision dans la représentation de l’espace dans le cerveau en étudiant les primates en mouvement libre
L’hippocampe est une structure du cerveau des mammifères qui a été impliquée dans la mémoire spatiale et la navigation. Son rôle a été principalement étudié chez les mammifères nocturnes, tels que les rats, qui ne sont pas adaptés à la vision de jour. Ici, Diego B. Piza, travaillant dans le laboratoire de Julio Martinez-Trujillo à Western University, démontre que pendant la navigation en 3D, le ouistiti commun, un primate du Nouveau Monde adapté à la lumière du jour, utilise des stratégies d’exploration-navigation différentes de celles des rats. Il montre également que les cartes de l’espace dans le cerveau du ouistiti dépendent des indices liés à la vision et des relations entre les objets utilisés comme points de repère pour la navigation. Il est probable que des mécanismes d’encodage similaires existent chez d’autres mammifères diurnes, dont l’homme.
Pour explorer leur environnement, les ouistitis utilisent principalement des déplacements rapides de la tête pour l’exploration visuelle tout en restant immobiles. Pendant les mouvements actifs, les ouistitis stabilisent leur tête, contrairement aux rats, qui utilisent des mouvements de tête à faible vitesse pour balayer l’environnement pendant qu’ils se déplacent. Ces travaux suggèrent que la mémoire spatiale chez les primates peut reposer sur l’ancrage de séquences de vues à des endroits spécifiques, ce qui constitue un mécanisme unique d’encodage des expériences spatiales.
Cette publication représente une avancée technique et conceptuelle majeure dans le domaine des neurosciences. En étudiant des primates naviguant librement dans un environnement 3D, elle surmonte les limites traditionnelles des études statiques, avec la tête immobilisée, couramment utilisés dans les études sur la navigation des primates et des humains. Elle remet en question la conception populaire de l’hippocampe en tant que « GPS » basée sur des études sur les rongeurs, où les neurones appelés cellules de lieu codent des emplacements physiques spécifiques. L’étude de primates naviguant librement, tels que les ouistitis, fait apparaître une primauté de la vision, montrant que les neurones hippocampiques intègrent de multiples variables – y compris la vue de l’espace, la direction de la tête et la vitesse – par le biais d’une sélectivité mixte. Cela suggère que la mémoire spatiale chez les primates pourrait reposer sur l’ancrage de séquences de vues à des endroits spécifiques, plutôt que sur des cartes de type coordonnées, fournissant ainsi un mécanisme unique d’encodage des expériences spatiales.
Ces travaux mettent également en lumière les circuits fondamentaux des calculs de l’hippocampe, ce qui a des implications importantes pour la compréhension de la mémoire et de la navigation. Étant donné la vulnérabilité de l’hippocampe dans la maladie d’Alzheimer, ces résultats pourraient éclairer les recherches futures sur les tests diagnostiques précoces (par exemple, les tâches de cognition spatiale centrées sur la vue) ou les interventions ciblant son architecture fonctionnelle. Cette étude ne fait pas seulement progresser notre compréhension de la cognition spatiale, elle offre également un cadre plus large pour étudier comment les adaptations écologiques façonnent les fonctions cérébrales dans différentes espèces.
À propos de Diego B. Piza
Diego Fernando Buitrago Piza a réalisé ce travail en tant que doctorant dans le laboratoire de Julio Martinez-Trujillo à l’Université Western. En tant que premier auteur, il a contribué à tous les aspects du travail rapporté dans cette publication, y compris la conception expérimentale, la collecte et l’analyse des données, la visualisation des données, ainsi que la rédaction et la révision du manuscrit.
Source de financement
Ces travaux ont été financés par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), une chaire universitaire provinciale sur l’autisme, la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI), la bourse BrainsCAN de l’Université Western et Healthy Brains, Healthy Lives (HBHL)