Niklas Brake, prix Cerveau en tête 2024

Niklas Brake

Niklas Brake, McGill University

Publication scientifique primée

Brake, N., Duc, F., Rokos, A., Arseneau, F., Shahiri, S., Khadra, A., and Plourde, G. (2024) A neurophysiological basis for aperiodic EEG and the background spectral trend. Nature Communications 15(1514).

https://www.nature.com/articles/s41467-024-45922-8

Une meilleure compréhension des composantes non rythmiques de l’électroencéphalographie (EEG) peut conduire à une meilleure interprétation de l’activité cérébrale

L’électroencéphalographie (EEG) est utilisée depuis près d’un siècle pour étudier l’activité cérébrale, période pendant laquelle les oscillations rythmiques du signal, perçues comme des vagues d’activité, ont formé une lentille unique à travers laquelle de nombreux chercheurs observent le système nerveux. Récemment, l’intérêt s’est porté sur les signaux EEG apparemment non rythmiques (c’est-à-dire apériodiques), qui ont été associés à divers troubles neurologiques et états de conscience. Cependant, ces résultats ont été essentiellement descriptifs, ce qui rend difficile l’interprétations de ces signaux apériodiques.

Dans cette étude, Niklas Brake, qui fait partie du groupe de recherche du professeur Anmar Khadra de l’Université McGill et qui collabore avec le Dr Gilles Plourde, anesthésiste à l’Institut neurologique de Montréal, a utilisé la modélisation biophysique pour montrer que d’importantes fluctuations apériodiques du champ électrique du cerveau proviennent de circuits corticaux qui se synchronisent avec une dynamique apériodique. Ces fluctuations peuvent à leur tour fausser considérablement les interprétations traditionnelles de l’EEG. En outre, le modèle prédit que les signaux EEG périodiques et apériodiques sont façonnés par les voies inhibitrices du cerveau. Pour le vérifier, les chercheurs ont recueilli des données EEG auprès d’individus sous anesthésie générale avec du propofol, un médicament qui modifie les molécules sous-jacentes à l’inhibition neuronale. Les changements de signaux observés correspondaient aux prédictions de leur modèle. En s’appuyant sur les résultats de la modélisation, ils ont mis au point une méthode d’analyse permettant d’identifier et de supprimer les signaux apériodiques de l’EEG, à la fois pour extraire les caractéristiques apériodiques et pour améliorer la caractérisation du rythme cérébral. L’application de cette méthode aux données EEG a révélé que la perte de conscience due au propofol était uniquement associée à une augmentation des rythmes delta, une observation qui avait été précédemment masquée par les effets moléculaires du propofol.

Dans l’ensemble, cette étude étend la théorie de l’EEG au-delà des oscillations neuronales, en illustrant comment les signaux EEG sont façonnés par des mécanismes neuronaux autres que les rythmes cérébraux et en révélant comment ces signaux peuvent fausser les méthodes d’analyse traditionnelles.

Cette publication a un large impact parce qu’elle présente une façon fondamentalement nouvelle de considérer l’EEG. Ce travail est le premier à proposer une théorie unifiée de l’EEG qui inclut une composante non rythmique, démontrant que l’EEG peut être généré à partir d’un mélange de signaux neuronaux périodiques et apériodiques. Les chercheurs s’attendent donc à ce que cette étude constitue un cadre théorique de base pour de nombreuses études futures sur l’EEG, en particulier celles qui cherchent à caractériser la dynamique d’états cérébraux spécifiques.

Après leur publication, ces résultats ont été utilisés par d’autres pour interpréter les signatures EEG d’un large éventail de variables expérimentales, notamment la récupération après un accident vasculaire cérébral, le syndrome de Down, l’autisme, la dépression, l’épilepsie, le sommeil et la perception visuelle. Il est important de noter qu’en liant les signatures apériodiques de l’EEG à des mécanismes physiologiques spécifiques, cette étude ouvre la voie à la recherche de nouveaux mécanismes neuronaux sous-jacents à ces diverses conditions, capacités cognitives et états de conscience. De la même manière que l’EEG a permis de relier les oscillations neurales à diverses fonctions cognitives, telles que les oscillations gamma et l’attention, cette publication promet d’inspirer des études sur la dynamique neuronale apériodique qui sous-tend les fonctions et les dysfonctionnements du cerveau.

À propos de Niklas Brake

Niklas Brake a réalisé ce travail en tant que doctorant dans le groupe de recherche du professeur Anmar Khadra au Centre de mathématiques appliquées aux biosciences et à la médecine de McGill. Niklas Brake est actuellement chercheur postdoctoral au Département de physiologie où il continue d’étudier la dynamique neuronale, en utilisant maintenant l’imagerie in vivo du calcium et de la tension chez des souris qui se comportent bien.

Source de financement

Ce projet a été financé par une subvention à la découverte du CRSNG au professeur Khadra et par des bourses de recherche de troisième cycle du FRQNT et de CRSNG-Foncer en dynamique complexe à Niklas Brake.